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Et voilà, tout a une fin. C'est notre dernier jour et nous comptons bien l'employer. Le petit déjeuner nous est servi à l'heure prévue la veille, dans la salle à manger au rez-de-chaussée. La table est dressée pour 4. On se croirait dans une bombonnière. Tout est à sa place au millimètre, il ne manque rien. Du coup, on déjeune silencieusement, doucement, précautionneusement, à deux doigts de mettre des patins sur les mains pour ne rien abîmer ni ne faire un seul bruit.

Un couple arrive qui a l'air de connaître la maison car ils vont directement dans la cuisine. Et pour cause : ce sont les propriétaires. Après une courte conversation en français avec la dame qui vient voir si tout se passe bien, on apprend qu'elle habite dans le nord du pays et possède cette petite maison d'hôte rénovée. La dame qui nous a reçus hier soir habite le village mais pas ici. Ici, elle fait le ménage et reçoit les clients. C'est elle qui nous attendait hier soir.

 

LE VILLAGE

 

Nous avons fait les remparts hier en fin d'après-midi et au soleil couchant, nous les attaquons ce matin pour les parcourir en entier. Pour nous Ôtres, Photographes, les lumières de début et fin de journée sont les meilleures car à la différence de celle du midi où il n'y a pas d'ombre, elles n'écrasent pas les sujets. Et souvent, plus la lumière est rasante, plus la photo sera belle.
La chaleur ne nous épargne pas : il est tout juste 9h30 et le soleil cogne comme jamais sur cette rocaille qui n'a pas eu le temps de refroidir de la veille. Nous découvrons l'autre côté des remparts et donc de la cité, avec son église, son jardin public extraordinairement frais et bien entretenu. Tiens, d'ailleurs, deux jardiniers sont en train de s'occuper de l'arrosage des plantes et des fleurs. La dame, d'un certain âge, court dans tous les sens sous son bob bleu marine, tirant et déplaçant le gros tuyau d'arrosage, tandis que des touristes se prélassent sur les bancs de pierre autour de la fontaine.

 

 

Nous poursuivons notre exploration et longeons les maisons jusqu'à l'autre bout des remparts. Puis nous revenons au point de départ, en nage mais heureux de nos photos. Le point de vue est exceptionnel, de tous côtés.

Sur son piton rocheux à environ 800m d'altitude, Marvão a toujours été une possession convoitée : par les Romains d'abord, puis les Wisigoths avant l'arrivée des Maures en 715. C'est d'ailleurs le Vizir de Coimbra qui lui donnera son nom actuel, d'après les historiens. Puis la cité tomba aux mains des Chrétiens en 1160. A 10 km de la frontière espagnole, elle devint ensuite une ville de garnison idéalement placée pour combattre les Castillans au XVIIe siècle.

Le village survit désormais principalement du tourisme, luttant pour conserver ses habitants. Notre logeuse nous avoue ce matin qu'il n'y a pas plus d'une centaine d'habitants à l'année, ici.

Les ruelles sont magnifiques : d'un blanc immaculé, elles suivent comme elles peuvent la topographie du lieu, offrant souvent des passages extrêmement étroits aux véhicules. Les maisons sont pour la plupart en excellent état. Nous ne croisons pas beaucoup de monde, ni de boutiques, à part deux ou trois vendant des articles touristiques ou aliments locaux. Nous achetons quelques bêtises puis rejoignons la voiture pour quitter définitivement ce beau village.

 

MIDI

 

Les routes sont sinueuses et étroites par ici. Et rurales aussi. Pour preuve : au détour d'un virage, on se retrouve nez à nez avec un paysan qui nous baragouine quelque chose sous sa moustache que nous comprenons néanmoins très rapidement : il faut rouler au pas, voire plus lentement encore, car son troupeau de vaches transite d'un champ à un autre par la route... Les 5 minutes suivantes comptent parmi les plus longues de ma vie : c'est moi qui conduis et effectivement, je roule à la vitesse de marche d'une mamie estropiée et en déambulateur, restant bien sagement de mon côté de la route, pendant qu'une cinquantaine de vaches accompagnées de leurs taureaux (oui, y'a tout ce qui faut au bon endroit, on a eu le temps de regarder) nous croisent sur la voie de gauche, tantôt calmes, tantôt inquiètes, tantôt trottant sur toute la largeur de la chaussée et bifurquant au dernier moment... d'autres encore, visiblement paniquées, font des allers-retours nerveux devant la voiture sans nous lâcher du regard. Je prie Notre Dame de Fátima qu'elle nous protège encore quelques minutes, elle nous doit bien ça après le temps que nous lui avons accordé il y a quelques jours.
J'ai néanmoins le réflexe de vouloir attraper ma caméra pour fixer cet instant pour l'éternité, mais elle est enfouie dans le capharnaüm de la banquette arrière, qui n'a cessé d'augmenter depuis le début du voyage, et je ne peux donc rien filmer. Pentax prend alors son appareil et se charge d'enregistrer la séquence. Nous sortons du nuage de bovins indemnes, comme notre veau de Fiesta. Même famille, ça doit être ça. Ils se sont reconnus.

Nouvelle angoisse existentielle : où allons-nous déjeuner ? Il est presque midi lorsque nous partons de Marvão et nous avons deux heures de route. Sachant que nous traversons pour une grande partie des montagnes, les chances de tomber sur un resto ouvert sont assez limitées. Tant pis, nous verrons bien. Cap sur Monsanto.
Non, lecteur. Pas la société américaine spécialisée dans la contamination chimique des terres et des populations un peu partout dans le monde sous couvert de recherche en biotechnologies agricoles, non.
Monsanto : petit village rural granitique de la Basse-Beira haut perché sur un versant rocailleux qui a remporté - attention, roulements de tambour - le concours du village le plus "portugais" en 1938 ! Ça calme, ça, lecteur, hein ?

Mais nous y reviendrons dans quelques lignes. Pour l'heure, nous avons le nez de nous arrêter dans une bourgade qui nous paraît assez grande pour avoir quelques restaurants dignes de ce nom. Nous en sommes aux dernières fois : dernier déjeuner. Nous nous arrêtons dans un resto à l'étage d'un immeuble moche et découvrons avec surprise une grande salle climatisée presque comble. La plupart des clients semblent être du coin et viennent se restaurer ici le midi. Beaucoup d'ouvriers, il y a une gigantesque usine de l'autre côté de la route.

Avec un menu uniquement en portugais, on ne peut qu'avoir envie de se lancer... en priant pour ne pas tomber sur un plat baignant dans l'huile. On connaît désormais quelques plats, quelques noms d'aliments, et pour l'inconnu, j'ai Google Trad sur mon téléphone. Le logiciel traduit quelques fois à côté mais souvent dans le mille. Tiens, là, par exemple, je sais que je vais manger du porc, et Olive, du veau, parce que les mots correspondent et l'assiette de mon voisin me fait envie.
On me sert donc du foie en sauce avec les frites (dont j'étais sûr), et Olivier a effectivement du veau. J'imagine qu'on m'a servi du foie de porc. La traduction me donnait "appâts" (et même pas "abats"!!). Bref. J'adore le foie et c'était succulent. Bien plus que les olives macérées de l'apéro qui sentent le lisier (de porc aussi, tant qu'à faire) et que nous laissons poliment. Par contre, lecteur, si jamais tu vas au Portugal, mange du pain. Paõ, en portugais. Leurs pains sont à tomber. Très souvent servis tièdes au restaurant, ils sont denses, croustillants. Un régal, même nature.

 

MONSANTO

 

Le ventre plein de notre dernier déjeuner portugais, nous reprenons la route pour Monsanto. Nous y arrivons vers 15h. Le soleil a passé son zénith mais de peu, et la chaleur est accablante. Monsanto n'est pas une cité médiévale mais juste un petit village typique accroché au versant d'une petite montagne et surplombé d'un castelo, une forteresse massive qui semble surgir des rochers en granit.

 

 

Le granit. Il est à Monsanto ce que le marbre est à Estremoz.
Ici, sans granit, point de village. Les rues, les allées, les ruelles, les maisons, le matériel public, le toit même de certaines maisons, tout, absolument tout est en granit. Comme je le disais plus haut, le village semble sorti de terre, comme façonné, sculpté à même la roche. Ici, tout est gris, noir, massif, lourd. On n'a pas envie de rire, à Monsanto. C'est du sérieux, du typique, du traditionnel, du séculaire, de l'immuable. Moyenne d'âge à Monsanto ? 60 ou 70 ans, au bas mot. Il y a plus d'habitants au cimetière que dans le village. Le weekend à Monsanto, c'est plutôt sieste et broderie que paintball et soirées mousse. Bref, Monsanto, c'est un autre monde.
Un autre monde dans lequel nous nous immergeons sans souci, si ce n'est cette terrible chaleur qui nous oppresse. Nous en faisons abstraction pour l'instant. A peine garés, nous sortons le matériel et nous voilà partis dans les rues grises et pourtant lumineuses du village assoupi. Point d'habitant pour l'instant, nous ne voyons que quelques rares touristes, l'oeil hagard, l'aisselle humide, le pas chancelant sous cette chaleur si intense qu'elle en paraît palpable.

Nous prenons directement la direction du Castelo. Les ruelles sont biscornues, tordues, les chaussées gondolées de pavés de tailles diverses, comme si elles avaient cuit et s'étaient raccornies. Un nombre insoupçonnable de maisons sont abandonnées, ouvertes ou closes, les toits éventrés, écroulés. Des déchets parsèment certaines allées, c'est scandaleux, quand tout autour a autant de caractère. Ici encore, les maisons, les rues suivent la topographie du lieu : le village ne s'est pas construit sur le granit, mais autour et avec le granit. De monumentaux blocs, des rochers immenses servent de murs, d'abris, de toit même. Les habitations absorbent les rochers, c'est étonnant. Le style est indéfinissable. Chacun y va de sa décoration ou pas, les portes sont de couleurs diverses, avec ou sans rideaux de plastique alors que du linge sèche ici où là, une radio braille, une meute de chats errants maigres comme un jour sans pain traverse la ruelle. Et pourtant, ce village est magnifique. Peut-être parce qu'il se fond si bien dans le paysage.

 

 

Bientôt, les maisons se font plus éparses, les pavés disparaissent et laissent place à de simples rochers qui affleurent le sol, entre les herbes et la paille, et c'est la montée au château. Un supplice de l'Inquisition. L'impression étrange d'être une pâte informe en train de se transformer lentement en cookie dans un four en marche. Nous visitons ce qui reste du château - des murs et un point de vue à 360° à couper le souffle, tout au sommet, je te rappelle qu'on est à un peu plus de 800m d'altitude, lecteur - puis pour ma part, la raison me quitte et la soif s'abat su rmoi comme la peste sur un miséreux. Je n'en peux plus. Mes jambes tiennent le coup, le souffle aussi, bien que la montée a été relativement sportive, mais le gosier dit stop. J'ai l'impression d'être un parchemin, une feuille de papier de verre. Chaque déglutition est une épreuve, comme si je devais avaler un mélange de sable et de colle. Je me pose dans un coin et j'attends un moment que Pentax ait terminé ses photos. Il fait grise mine aussi, mais une fois lancé, il est totalement incapable de s'arrêter de shooter. Il continue de parcourir les remparts alentours.

 

 

Nous redescendons finalement et nous arrêtons au premier bar venu. On se refait immédiatement une santé en commandant non pas deux pasteis de nata (je me refuse à en manger désormais, je ne retrouverai jamais le goût de celles de Belém à Lisbonne) mais deux pasteis de cereja : des tartelettes à la cerise. Pour voir. Et comme on a soif, on commande de l'eau fraîche bien sûr. Et aussi deux verres d'hydromel, pour le goût.
Nous nous installons sur une petite terrasse granitique intelligemment agencée et restons là une vingtaine de minutes, le temps de nous recomposer. Le dernier snack. Quelle émotion. Nous en profitons au maximum puis nous repartons lentement vers notre voiture et quittons Monsanto, non sans avoir auparavant parcouru deux ou trois rues et pris quelques photos. La lumière était au top, c'était inévitable.

 

  

 

 

DERNIÈRE GALÈRE

 

Nous arrivons dans le patelin où nous avons réservé notre chambre une dizaine de minutes après, on est à 11 kilomètres. La guest house est très jolie, très propre (trop propre même : ça sent la javel à plein nez partout) et nous finissons cet après-midi au calme, moi dans la douche en train de me raser la tête, Olive sur le lit à lire les news sur internet.
20h passées : il faut aller manger. Nous pensons trouver sans peine un restaurant dans cette petite ville. Nous tournons et virons pendant un moment, cherchant à se rapprocher au maximum du centre historique car c'est en général là que les touristes se concentrent... les rues deviennent des ruelles, le bitume des pavés et les abords se peuplent de plus en plus de personnes âgées sorties à la fraîche.
En fait, on dirait que toute la population du bled est dehors. Ici, assis sur le rebord de la fontaine du rond-point, chacun regardant dans une direction différente, comme s'ils guettaient les voitures, ou discutant tous des potins du jour ou de la météo du lendemain, ou de ces deux oiseaux, là, dans leur voiture française, qui viennent de prendre un rond-point à l'envers, et d'où viennent-ils, d'ailleurs, ces deux-là ? Encore des touristes, bah.

Nous arrivons dans une ruelle qui se divise en deux en face de nous avec au centre un panneau annonçant une impasse. Super, mais de quel côté elle est, l'impasse ? Pfff. Nous ne pouvons même pas faire demi-tour. Derrière nous, une demi-douzaine de papis et mamies portugais ont suspendu leurs conversations et nous scrutent, sans piper mot. J'ai l'impression de passer un oral, ça me stresse et m'énerve.

Je fais une marche arrière bien propre, et repars la tête haute, grand prince, sans leur jeter un seul regard. Digne.
Nous finirons par leur dire bonjour 2 minutes plus tard lorsque nous aurons garé la voiture pas très loin pour aller voir cette terrasse dans l'autre ruelle, qui ressemble à celle d'un restaurant. A notre boa tarde (bonne soirée), un papi lâche le cuissot de sa mamie et nous bredouille un boa tarrrrde automatique, apparemment surpris qu'on les salue.

La terrasse s'avère n'être que celle d'un bar. Nouvelle manoeuvre avec la voiture devant la même demi-douzaine de paires d'yeux (et sûrement autant de dents en tout) et nous voilà partis pour le patelin d'à-côté. Car au souci de trouver un endroit pour manger, un autre est venu se greffer : nous n'avons plus beaucoup d'argent liquide, et les commerçants refusent très souvent la carte, prétextant que leur terminal ne les prend pas (ce qui est vrai parfois, mais surtout parce qu'ils ne veulent pas payer de taxe supplémentaire apparemment). Le premier distributeur est à une vingtaine de kilomètres. C'est hors de question que nous y allions.

Nous faisons alors nos poches et comptabilisons un peu plus de 80 € en cash. Cela devrait passer pour le resto ce soir et la chambre à payer demain. En route pour ce "patelin d'à-côté", nous passons un établissement en bord de route avec beaucoup de voitures garées devant. Ca ressemble à un restaurant. Olivier a le nez creu : c'en est un. Mais une sorte de routier familial. Déception pour notre dernier dîner, nous qui voulions nous en faire un bon. Tant pis. On a la flemme de pousser plus loin, on a chaud, on a soif et on a faim. Et finalement, sans être exceptionnel, le resto fera à peu près l'affaire.

Voilà, le voyage est terminé. Demain, lever à 7h30 pour un dernier pequeno almoço, un dernier petit déjeuner, à 8h. Et après, 950 km de chaleur climatisée pour rejoindre Mérignac.

 

 

 

 

 

   

 

 Notre Avis sur 5 

 ... qui n'engage que nous!

 

Marvão🤩🤩🤩🤩🤩

✅  Magnifique village fortifié. Cadre incroyable.

 

Monsanto 🤩🤩🤩🤩🤩

✅  Encore un  village typique,  granitique cette fois. Paysage grandiose.

  

 

 

 

 

 

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Pourquoi "Ways and Days"?

Ways, c'est "chemins" en anglais. Et days, jours, bien sûr.

A travers ce blog, je partage ma double passion : la photographie et les voyages. Rien de bien extraordinaire, évidemment, mais ce ne sont pas de simples voyages "géographiques" qui me font parcourir des chemins aux quatre coins du monde, même si l'attrait est évident. Je fais également de la photo d'UrbEx, c'est à dire d'exploration urbaine, qui m'entraîne à découvrir des lieux abandonnés : capter le souvenir de cette vie passée, de cette agitation qui n'est plus, capturer les traces du temps, de ces jours, de ces années, envolés, le délabrement progressif des murs, des meubles, des objets oubliés, ces atmosphères pétrifiées, imaginer des vies souvent d'une autre époque, penser à ces âmes qui ont un jour parcouru ces lieux constitue pour moi autant de voyages temporels.

Chère lectrice, cher lecteur, tu trouveras une partie photos avec des galeries d'images, et aussi, si tu es plus intéressé(e), une partie carnets de voyage, ou tu pourras lire le récit au jour le jour de nos péripéties à l'étranger. Une dernière partie sera consacrée à l'UrbEx.

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